mardi 22 janvier 2008

UN PAS EN AVANT, UN PAS EN ARRIERE

Ira ou n'ira pas ? À moins de cinquante jours du premier tour des municipales, Nicolas Sarkozy a explicité clairement sa nouvelle stratégie. En déplacement à Pau et à Bordeaux, il a estimé, mardi, qu'il n'avait "pas à se mêler des élections municipales" et qu'il n'allait pas "s'engager sur chacun des combats municipaux". "Ce n'est pas mon travail", a-t-il assuré. Récit d'un rétropédalage.

Nicolas Sarkozy en campagne

C'est une tout autre attitude qu'affichait Nicolas Sarkozy, début septembre 2007, en soutenant la candidate UMP à la mairie de Paris, Françoise de Panafieu. Le 4 septembre, il a ainsi aidé à la constitution des têtes de listes UMP à Paris. La maire sortante du 17e déclare alors : "Le Président n'avait pas à me réaffirmer son soutien parce qu'il ne m'a jamais manqué. Il n'a jamais cessé de me soutenir."

Le mois suivant, le président intronise son porte-parole, David Martinon, à Neuilly. Pour cette campagne aussi, le chef de l'État répond présent. Puis vient le tour de Nice. Le 22 octobre, Sarkozy intervient directement en recevant le maire sortant Jacques Peyrat, en conflit ouvert avec l'UMP Christian Estrosi, candidat à sa succession.

"Je m'engagerai" (Nicolas Sarkozy, le 8 janvier)

Retour à Paris. Début novembre, Françoise de Panafieu déclare : "Il y a fort à parier que Nicolas Sarkozy s'impliquera" dans la campagne de Paris. Un thème que la maire du 17e arrondissement reprendra début janvier en estimant qu'elle "n'envisage pas que Nicolas Sarkozy ne s'implique pas du tout dans une élection locale avec de tels enjeux". Et pour ceux qui n'auraient pas encore compris, les deux responsables politiques s'affichent ensemble lors d'un déjeuner, le 17 janvier.

La doctrine du président semble donc claire. Lui-même la définit lors de sa conférence de presse de rentrée, devant 700 journalistes: "Je m'engagerai, parce que le concept même d'élection dépolitisée est absurde. Je m'engagerai, à la place qui est celle du président de la République, je peux dire que le Premier ministre s'engagera, à la place qui est celle du Premier ministre, comme les ministres, pour mobiliser notre électorat."

"Nous allons lui répondre dans les urnes" (Ségolène Royal, le 12 janvier)

Une conception reprise par François Fillon, quelques jours plus tard, devant le Conseil national de l'UMP : "Je serai à vos côtés pour mener la bataille des municipales. J'y serai, avec le gouvernement, non pas pour détourner ce scrutin de son évidente dimension locale, mais pour rappeler que ce qui se fait pour la France n'est pas dissociable de ce qui peut se faire dans nos communes", développant ainsi une conception des municipales qui ne fait pas l'unanimité à l'UMP ( voir notre article ).

Profitant de l'aubaine, l'opposition déclare également vouloir donner une double dimension à ces municipales. "Les municipales sont un enjeu très important. C'est un test national, a dit Nicolas Sarkozy [...] Eh bien, nous allons lui répondre dans les urnes en votant massivement pour les candidats socialistes et de gauche", déclare Ségolène Royal lors d'une réunion publique à Saint-Brieuc, le 12 janvier.

79 % des Français voteront pour des enjeux locaux (sondage du 13 janvier)

Mais le 13 janvier, pour la première fois, l'Élysée change de ton. Sur Canal+, le secrétaire général de l'Élysée, Claude Guéant, affirme que pendant la campagne des municipales, Nicolas Sarkozy "va rester dans le rôle qui est le sien", celui de président de la République, et qu'il "n'ira pas faire campagne pour tel ou tel maire". Hasard du calendrier, le même jour, un sondage (pour Libération ) révèle que 79 % des Français voteront pour des enjeux locaux aux élections municipales de mars. Et que s'il s'agissait de sanctionner Nicolas Sarkozy, 37 % des Français seraient prêts à le faire, plutôt que le soutenir (33 %). De même sont-ils 72 % à estimer que le chef de l'État "ne devrait pas s'impliquer dans la campagne des élections municipales".

"La dimension locale prime aux municipales" (UMP, le 15 janvier)

Résultat, l'Élysée essaie de corriger le tir. François Fillon précise, dans la soirée, que les municipales ne doivent pas être une élection "pour ou contre Nicolas Sarkozy." Le Premier ministre évoque une "confusion dans les esprits : quand nous parlons des enjeux nationaux de cette élection, c'est à cause des choix politiques et aussi à cause du fait que les commentateurs et l'opposition ne manqueront pas, au moment du résultat des élections, surtout si jamais ils ne sont pas très bons, d'en attribuer la responsabilité au président de la République et au gouvernement", explique-t-il. Enfin, c'est au tour d' Henri Guaino, conseiller spécial du président Nicolas Sarkozy, de rappeler que les élections municipales sont "des élections d'abord locales".

Le changement de discours est radical. Même le porte-parole de l'UMP, Yves Jego, en perd son latin et évite soigneusement la contradiction en déclarant que "si Nicolas Sarkozy s'engage" dans la campagne des municipales et cantonales, il le fera "à sa place de président de la République". Et la ligne du parti ? L'UMP "souhaite que ce soit la dimension locale qui prime aux municipales. Mais les Français doivent avoir "à l'esprit que leur vote sera analysé sur des enjeux nationaux."

Le 18 janvier, un autre sondage (pour LCI et Le Figaro ) vient confirmer celui du 13. Dans cette enquête, 73 % des Français estiment que les municipales sont un enjeu avant tout local. Résultat, le même jour, c'est Nicolas Sarkozy lui-même qui déclare, alors qu'il est reçu à la mairie de Sens par la députée-maire Marie-Louise Fort, candidate à sa succession aux municipales : "Je ne suis pas en campagne", avant de souligner dans son discours que, pour lui, "le grand rendez-vous, c'est dans cinq ans".

Source : Le Point

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